Accéder au contenu principal

3 mars 2022, J moins 38

"La campagne d’Eric Zemmour est-elle en train de dérailler ?", s'interroge L'Opinion. Il est "soufflé par la crise ukrainienne", précise Le Point. France Info estime qu'il a "trébuché sur l'accueil des réfugiés ukrainiens". La radio publique ajoute que le candidat a "annulé sa présence" à la matinale de ce matin : "son entourage a choisi la discrétion, pour ne pas surexposer le candidat."

Ne pas surexposer le candidat à quoi ? La réponse est claire : au rappel de ses déclarations multiples et clémentes, dirons-nous, sur M. Poutine.

Festival de compassion pour le peuple ukrainien hier sur CNews, dans l'émission Demandez le programme. "Aujourd’hui, le patriotisme de Zelensky est un patriotisme héroïque", assure Zemmour, s'attirant les critiques d'une partie des siens pour qui le narratif russe sur les nazis est la vérité vraie. Pas si vite, dit le candidat : "Traiter le président Zelensky, qui est Juif, de nazi, c’est grotesque et indigne de la part de Poutine." Aussitôt sur Twitter fleurissent les messages qui rappellent les "massacres" qu'aurait perpétrés l'armée ukrainienne au Donbass. Triste destin que de se voir happé par Charybde et mordu par Scylla.

Beaucoup de ces réponses paraissent provenir d'électeurs potentiels de Zemmour, sidérés par la retenue du candidat. La prudence s'impose, naturellement, mais je ne me souviens pas d'avoir déjà vu de telles déchirures parmi les commentateurs proches de Reconquête. Pour une part de ceux-ci, M. Poutine est dans son droit le plus strict et a pleine raison de vouloir mettre un terme aux horreurs dont la minorité russophone de l'est ukrainien serait la victime.

Hélas pour eux, Zemmour adopte un langage que l'on n'aurait aucun mal à envisager dans un discours de Macron, voire de Bernard-Henri Lévy : "Je pense que Poutine a sous-estimé l'émergence d'un sentiment national ukrainien. Les Ukrainiens se battent, c'est un peuple fier, ils résistent face à l'offensive d'une armée plus puissante que la leur." Nicolas Gogol n'aurait pas mieux tourné son éloge à Tarass Boulba. Quant aux Russes, ils sont "capables de tout". Où l'on découvre Éric Zemmour adepte des maximes de John Rambo.

Zemmour : "Je veux une paix rapide. Les Russes sont capables de tout."
Zemmour : "Je veux une paix rapide. Les Russes sont capables de tout." (lien)

On apprend incidemment que Marion Maréchal se serait enfin prononcée en faveur du candidat, et que la jeune femme assistera, selon toute vraisemblance, à son prochain rassemblement. Reconquête compte sur l'événement pour relancer une "dynamique" grippée : Paris Match note la perte brutale de "trois points en trois jours" dans les intentions de vote en sa faveur. Résultat, l'ancien finaliste présumé redevient bon quatrième, à la traîne de Mme Pécresse qui, avec ses 13,5% n'est déjà pas très haut.

Le sobriquet "Vladimir Zemmour" fait florès. Je l'entendais ce matin sur RTL et une recherche rapide montre que l'expression apparaît à plus de 1600 reprises dans les pages de Google News. Claude Malhuret a eu la main heureuse, au même titre que celui qui inventa cet "Ali Juppé" qui provoqua la chute d'un prétendant sérieux aux dernières présidentielles.

Article de la veille    Article du lendemain

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

5 avril 2022, J moins 5

Viktor Orbán triomphalement réélu en Hongrie reçoit les félicitations du Kremlin et critique Volodymyr Zelinsky. On l'a déjà lu, certains commentateurs ou élus français évoquent ouvertement une cinquième colonne poutinienne dans l'Europe démocratique. Le dictateur aurait des relais un peu partout - en Hongrie, donc, en Allemagne, naturellement, et en France : avec Zemmour et Le Pen, il tiendrait deux fers au chaud pour préparer le monde d'après, délivré de l'insupportable tutelle atlantiste et augurant d'amicales coopérations avec la grande fédération de l'Est. Dans ce contexte, plusieurs voix s'étonnent de l'apparition soudaine, dans la dernière ligne droite, du drame qui endeuilla Bobigny, en février. Cette tragédie serait-elle instrumentalisée par des esprits retors et en mission pour l'étranger ? D'un autre côté, comment penser en taire l'horreur, qui soulignerait, si les faits sont avérés, à quel point nos cités sont imprégnées d'un...

11 avril 2022, le jour d'après

Zemmour appelle à voter Le Pen au second tour. C'est, je crois, le seul qui ait fait ce choix, assumant les erreurs qui ont fait échouer son projet. Le geste est valeureux mais convenu, voire suspect de la part d'un homme si fier de ne jamais regretter quoi que ce soit. Ce manque d'humilité ne l'a pas servi. Le petit sourire goguenard qui avait pris l'habitude d'apparaître sur son visage lors des débats porta haut le symbole de cet orgueil : moi je sais, semblait-il dire, mieux que vous tous ; j'ai lu plus de livres que vous, et depuis plus longtemps ; j'ai mieux étudié la situation et mon analyse est imparable, car je viens nanti de ma longue expérience de la scène politique. Ce petit sourire était celui d'un fort en thème assuré de sa victoire. Comment échouer quand on maîtrise les codes et que l'on a pénétré comme personne l'inconscient d'une France qui ne voulait pas mourir ? Vaines tartarinades. À présent que le premier tour est ache...

10 avril 2022, jour J

Sous le mot-clef #RadioLondres , des usagers de Twitter transmettent des messages codés sur l'avancement du vote et les tendances qui s'en dégagent. Fiable ? Visiblement non, le canal étant saturé par les mélenchonistes et les zemmouriens. Il s'agit d'une opération de propagande en temps réel, tirant à hue et à dia (à pou et à tine serait plus indiqué, dans les circonstances), mais d'où certaines vérités peuvent émerger, comme ce fut le cas lors de précédents scrutins. Midi J'apprends que la tortue est le mot de code pour Mélenchon. L'animal (la tortue, donc) serait très bien parti. L'olivier aussi, du reste - on reconnaît ici la version française du nom Zemmour, décliné sur les toutes les variantes du Z (Zorro, ou Zoro pour les mauvais scripteurs, à moins qu'il ne s'agisse d'adeptes pressés de Nietzsche, les z'abeilles, les z'émus, etc.) Rien à porter au bénéfice de Macron, affublé des sobriquets "le poudré" ou "le béb...