La guerre en Ukraine continue. Celle de nos rues aussi. Une équipe de tournage d'une série avec Omar Sy, Lupin, a été attaquée en plein jour à Nanterre. Les assaillants auraient dérobé l'équivalent de 300 000 euros.
Gilbert Collard sur le braquage de l'équipe de tournage (ici) |
À Drancy, des Turcs se frotteraient à des Kurdes, au vu et au su des habitants du lieu.
Zemmour : "Drancy, la ville où j'ai grandi, devenue un champ de bataille pour gangs de barbares." (ici) |
Ceux qui condamnent l'action russe, et ils sont nombreux, paraissent impuissants à réprouver la bataille qui s'est emparée de quartiers entiers, depuis bien des années, conflit sournois et incessant où se faufile un autre clash of civilizations (Christian Jelen : La guerre des rues, 1999, déjà). Inquiétante classe politique où les valeurs s'inversent en fonction de critères essentialistes.
Pour les uns, il ne faut pas taper sur les Russes, comprendre leurs motivations et se convaincre que le véritable coupable est à Bruxelles ou au Pentagone. La souveraineté ? Bon pour les grandes nations, cette affaire-là, la France, la Russie, l'Allemagne. Les petites nations, après tout, sont vouées à rester dans la pénombre de l'histoire, sinon à disparaître, fût-ce avec notre aide. On croirait relire les délires de Marx et Engels sur ces peuplades moribondes qu'il faudrait éliminer pour le bien de l'humanité.
Les tenants du "grand remplacement" parlent volontiers d'envahisseurs avec leurs "uniformes" (voiles, djellabas...) et leurs "coutumes" (kebabs, prières de rue...), de "génocide par substitution" pour désigner le comportement de personnes qui entendent vivre en France sans rien adopter des mœurs françaises. Ils semblent incapables de prendre en considération le "grand remplacement" à marche forcée opéré par la Russie - il est trop tôt pour parler de l'Ukraine, mais le précédent moldave en est une parfaite illustration. Histoire officielle contrefaite, langue, originellement romane, slavisée, retour à l'alphabet cyrillique. Une culture a disparu, mise à bas par celle de l'occupant. Oana Orlea trouve les mots justes pour décrire cette catastrophe dans un de ses livres (Les années volées, si je ne me trompe). Si les mots "génocide par substitution" ont un sens, alors ils s'appliquent sans l'ombre d'un doute à ce qui s'est passé en Moldavie, sous l'égide de ces Russes incompréhensiblement privés de notre empathie.
Pour le camp opposé, les individus qui terrorisent nos rues sont des victimes de notre égoïsme et de notre incapacité à tirer les leçons de la période coloniale. Il est temps de faire tomber les écailles de nos yeux et de contempler, dans toute son horreur, l'ampleur de nos crimes. Ce que nous vivons est le prix à payer pour en atténuer les conséquences, sans que cela ne soulage en rien le fardeau de l'homme blanc. Aussi est-il vain, que dis-je, immoral de défendre nos traditions. En revanche, les Ukrainiens méritent tout notre soutien pour oser préserver les leurs, les armes à la main et investis de la plus noble mission qui s'impose à un peuple envahi, dût-elle faire couler le sang et annoncer des carnages.
Le mystère est épais et sa clef m'échappe. Aucune voix ne paraît porter haut les deux termes d'un même combat. Réclamer la souveraineté pour la France pose aussitôt un corollaire : reconnaître le droit à la souveraineté des autres pays. Éric Zemmour aurait pu porter cette voix, mais sa pente ne l'entraîne pas en de tels parages.
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