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18 février 2022

Le mot-clef #Zemmour2eTour est en tête des tendances Twitter à l'instant à j'écris ces mots. L'offensive d'une équipe numérique décidément très efficace se fait l'écho du sondage qui tomba cette après-midi comme l'éclair surgi "d'un nuage noir où serpentait la foudre". L'IFOP donne Zemmour qualifié pour le second tour. On n'avait plus vu telle chose depuis l'automne. Les deux suiveuses, Mmes Le Pen et Pécresse, restent dans l'extrême voisinage, il est vrai, et moyennant la fameuse marge d'erreur il n'y a pas foncièrement de bouleversement dans l'électorat des sondeurs. Mais la sacro-sainte "dynamique" s'exprime ici, qui hisse l'homme de la reconquête à son plus haut niveau, et souligne incidemment la perte de vitesse de ses concurrentes directes.

Ce n'est que justice dira-t-on, et l'on n'aura pas tort. Zemmour est porté par une cohérence et la charpente d'une idée interne que l'on peine à discerner ailleurs. Non qu'il soit crédible sur tous les sujets qu'il aborde, loin de là, comme je l'ai tant de fois souligné depuis fin août. Il n'en reste pas moins un phénomène - au sens quasi scientifique - qui entraîne tout une coterie à emprunter des territoires où elle s'y trouve démunie, empruntée, tant est lourd son passif et fort l'interdit du langage convenu. Là se trouve sa vulnérabilité face à la simple expression d'une vérité, ou d'une possible vérité : celle du grand remplacement.

Jacques Attali sur le grand remplacement
Jacques Attali sur le grand remplacement (lien). Voir aussi son article "Le Grand Obscurantisme".

Rappelons que, selon Wikipédia, "Le grand remplacement est une théorie du complot d'extrême droite" qui repose "sur des principes xénophobes et racistes". Or, Jacques Attali a tweeté : "Le grand remplacement est une réalité de la vie, des peuples, des cultures, des langues." La logique voudrait dès lors - ne reculant devant aucune expérience amusante, je revêts ma tenue de Frankenstein et synthétise Attali avec Wiki - que "Cette théorie du complot d'extrême droite qui repose sur des principes xénophobes et racistes est une réalité de la vie, des peuples, des cultures, des langues."

Hum, il y a quelque chose qui cloche là-dedans. La définition wikipédienne est mal fichue, ou bien c'est celle de l'écrivain, ou bien les deux sont bancales. Chacun sera d'accord pour reconnaître que l'emploi de la locution devient courant, ou assez courant, et qu'il ne s'agit en aucune façon, sous la plume d'Attali, d'une théorie mais d'une réalité qu'il commente en termes plutôt neutres ou positifs pour mieux condamner un "grand obscurantisme". Sans vouloir peiner qui que ce soit, je ne pense pas que cette dernière expression fera de l'ombre à sa sulfureuse devancière.

En réaction à l'expulsion des pro-Zemmour du grand site collaboratif, les forces numériques du candidat lancent le mot-clef #WikipediaCensure où s'expriment tous les reproches envers la prétendue encyclopédie.

L'un des tweets #WikipediaCensure
L'un des tweets #WikipediaCensure (lien)

Toutes les variations sur "repère à gauchistes", la "neutralité" revendiquée, le "noyautage" par "l'extrême-gauche, la bien-pensance et le wokisme" y forment un fil virulent. Pour dire le fond de ma pensée, je ne serais pas étonné que cet événement forme le premier épisode d'une série d'expulsions, depuis longtemps redoutée ou espérée, des autres outils numériques choyés par le candidat. À quand les purges de Facebook, Twitter, YouTube... ?

Côté Wiki, on se drape dans sa dignité, comme on le lira dans le communiqué de Wikimédia France. "La neutralité dont Wikipédia se targue a toujours pu être préservée", trouve-t-on ici. "Se targue" est très bien choisi, mais bon, on aimerait que la neutralité ne soit jamais le principe fondateur d'un projet encyclopédique. Préférer la neutralité à la vérité est comme défendre l'égalité contre la liberté : dans les deux cas la belle aventure tourne à la catastrophe.

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