Peu osaient le prédire. Valérie Pécresse ne s'est pas fait massacrer, pas davantage assommer, écrabouiller ou anéantir, contrairement au spectateur. Rien de substantiel n'est sorti de ce festival d'invectives et d'accusations réciproques, si ce n'est le constat, assez largement partagé, que Pécresse a tenu tête et a même remporté la victoire, comme le juge l'Express.
Difficile de s'accorder avec ce diagnostic sur le plan des idées, au vu du charivari entretenu par les deux opposants. En revanche, la candidate a sérieusement bousculé Zemmour sur des sujets que l'on pensait mieux verrouillés par son contradicteur. Je pense par exemple à l'accusation (attendue) de l'attirance qu'il exerce sur des gens ouvertement situés à l'extrême droite (bras tendu, Zouaves, personnes trempant, semble-t-il, dans des cercles sympathisants d'un certain socialisme et d'un certain nationalisme). Zemmour s'est contenté d'assurer que ces individus ne sauraient prendre comme chef de file un juif (l'argument, hélas pour lui, est faible, et il n'est même pas sûr que ce soit un argument) avant de contre-attaquer en pointant les connivences entre LR et des islamistes. La réponse est médiocre, car enfin, s'il était vrai que des compromissions inacceptables existent dans le camp républicain, en quoi excuseraient-elles le ralliement à Reconquête de personnalités extrémistes ? Ceux qui espéraient une réfutation de ces accusations sont restés sur leur faim, et sont sortis de la séquence avec l'idée malaisante qu'effectivement les accusations de Mme Pécresse pourraient avoir touché juste.
Tweet de Valérie Pécresse (lien) |
Descendu de l'estrade où il énonce son discours, Éric Zemmour perd de sa superbe, s'énerve, tombe dans le piège ouvertement tendu d'un pugilat verbal. Le petit sourire qu'il affectait au début, et qu'il tâcha de conserver pendant l'heure et demie de la confrontation, n'a rien fait pour consolider l'image d'un présidentiable : à ce jeu-là il apparut hautain et trop sûr de lui. Il a glissé de la confiance à l'arrogance, perdant l'occasion de "tuer" sa compétitrice. Celle-ci, avec ses coups de gueule, ne s'est pas pour autant affirmée comme une future présidente, mais la performance de résister aux assauts du "Mohamed Ali" des débats, et de lui décrocher quelques uppercuts bien sentis, l'ont, contre toute attente, réinstallée dans le camp des candidats qui comptent.
On présume que l'affaire est suivie avec des gloussements de plaisir au RN et à la France Insoumise. Dans quelques enquêtes d'opinion, on voit Mélenchon se faufiler insensiblement vers le haut, dépasser Pécresse, certes, mais également parfois prendre le meilleur sur Zemmour. De quoi ébranler la sérénité de Reconquête ? Cela serait logique et même salutaire pour l'avenir d'un parti à la jeunesse agitée.
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