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5 janvier 2022

"J'ai toujours condamné la violence. C'est l'arme des faibles politiquement, des faibles intellectuellement, l'arme de ceux qui ne pèsent rien, de ceux qui ne pensent rien. C'est pourquoi elle va si bien à l'extrême gauche." Dans ses vœux diffusés hier, Zemmour met une fois de plus les choses au clair. Je ne parierais par un Zcoin sur un retournement d'opinion du côté de Charlie Hebdo ou de Libé : admettre la non-violence de Zemmour, ce serait renoncer à en faire l'infernale créature à l'haleine de soufre surgie d'un infra-monde gouverné par la droite extrême.

Zemmour se félicite de ses "75 000 adhérents", envoie embrassades virtuelles à tout vent, à sa jeune armée, aux transfuges des Républicains, du RN et de la gauche, car, vous l'aurez compris, "tous les destins français menaient à nous". Nous : "la droite qui tiendra parole" (ça, c'est pour Pécresse), malgré le "grand théâtre antifasciste" mis en scène par la presse de gauche. "Nos militants sont ceux de l'avenir ! C'est nous qui avons écrit l'histoire de cette élection depuis septembre !" Objectivement, ce n'est pas faux. Le contrefeu est bien identifié :

"Macron veut faire du COVID le sujet de cette présidentielle. Il veut nous faire oublier le destin de la France."

Emmanuel Macron, comme pour répondre à cette divulgation de sa stratégie, s'est mis dans la peau d'un artificier spécialisé en fracturation hydraulique, parvenant à dynamiter en quelques mots bien sentis son opposition. Quelle meilleure arme qu'un gros pétard estampillé "DANGER - COVID" ?

"Moi, je ne suis pas pour emmerder les Français. Je peste toute la journée contre l'administration quand elle les bloque. Eh bien là, les non vaccinés, j'ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire, jusqu'au bout" (Les Echos).

Ces grossièretés pompidoliennes et simili-trumpiennes (fichu "en même temps" !) ont l'immense vertu, pour le président, de flatter la majorité des vaccinés tout en crispant ses adversaires, plus ou moins gênés par le sujet et contraints à prendre parti. C'est bien joué, quoi que l'on pense de l'éthique du procédé - je veux dire, bien joué électoralement, à condition de tenir ce cap et d'en gérer les conséquences jusqu'au scrutin. À ce que je peux en juger, notre président actuel s'est plusieurs fois confondu en excuses, voire en regrets, pour des mots jugés trop vifs, trop hâtifs, et finalement blessants, et il n'est pas certain de tirer profit, à moyen ou long terme, de ce double attentat à la langue et à la common decency.

Zemmour, descendu par la force des choses de l'estrade de chef d'où il imposait son tempo, commente en termes rageurs :

"Lâche avec les forts, cruel avec les faibles."
"Lâche avec les forts, cruel avec les faibles." (Tweet)

L'homme de Reconquête s'efforce de rapporter la sortie présidentielle à ses propres priorités. Cela est de bonne guerre, et assez convenu. J'aurais aimé lire plus de réactions à la deuxième phrase d'Emmanuel Macron, qui me semble au moins aussi porteuse d'embarras que les autres : "Je peste toute la journée contre l'administration". Un président qui peste ! Que dire alors du Français de la rue ? Les bras m'en tomberaient si je ne devais écrire la fin de cette chronique. Car, enfin, c'est à se demander qui a les leviers pour rendre enfin efficace cette fonction publique capable d'arracher des soupirs de contrariété au plus puissant des Français.

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